Définition de la méditation de pleine conscience

Une difficulté à définir

Définir la pleine conscience conduit à des difficultés car la notion peut faire référence sans distinction à différentes approches. Elle peut refléter un état d’esprit, un type spécifique de processus psychologique ou encore un type de pratique méditative. (Germer et al., 2005 ; Brown, Ryan & Cresswell, 2007 ; Grossman, 2008 ; Shapiro, 2010). Il existe ainsi une incertitude et des ambiguïtés sémantiques autour de l’expression « pleine conscience ». Il semblerait que le terme de pleine conscience traduise à la fois l’action et le but de l’action. (Trousselard, 2016).

Certains auteurs comme Germer et al. (2005) adopte des définitions très larges, et pour ces derniers la pleine conscience serait simplement une conscience d’instant après instant. Le critère distinctif de cet état serait alors la conscience du moment présent.

 

Les tentatives de définition
La définition de Kabat-Zinn et Martin

D’autres chercheurs caractérisent la pleine conscience comme un état de conscience résultant d’une qualité d’attention particulière. C’est ainsi que pour Kabat-Zinn (2003, p.45) c’est « un état qui résulte du fait de porter son attention, de manière intentionnelle, au moment présent, sans jugement, sur l’expérience qui se déploie, instant après instant » et pour Martin (1997) c’est un état de liberté psychique qui survient quand l’attention demeure silencieuse et souple, sans attachement à un point de vue particulier.

 

La définition d’André

André (2010) fait un lien entre ces deux perspectives. Pour lui, la qualité de conscience qui émerge lorsqu’on tourne intentionnellement son esprit vers le moment présent est synonyme :

  • D’une attention portée à l’expérience vécue et éprouvée
  • Sans filtre (c’est-à-dire qu’on accepte ce qui vient) ;
  • Dépourvu jugement (on ne décide pas si c’est bien ou mal, désirable ou non) ;
  • Sans attente (on ne cherche pas quelque chose de précis) ;

 

Ainsi la conscience du moment présent génèrerait de facto certaines qualités attentionnelles.

La définition de Ricard et de Marlatt et Kristeller

D’autres auteurs insistent davantage dans leurs définitions sur le fait que la pleine conscience est avant tout une pratique. Ainsi pour Marlatt et Kristeller (1999), la pleine conscience consiste à centrer toute son attention sur l’expérience présente. Ricard (2015) insiste également sur cet aspect. Il parle de la pleine conscience comme étant une pratique. Le méditant prend mentalement note de ses sensations corporelles, de ses émotions et de son discours intérieur. Ce dernier reste conscient de ce qui se passe sans se préoccuper d’aucune perception ou pensée isolée. Il revient se reconcentre chaque fois que son esprit vagabonde.

Il convient de noter que toutes les définitions font de la conscience du moment présent et de la qualité d’attention les critères fondamentaux de la pleine conscience.

 

La définition de Braza

Braza (2007) évoque l’importance de ce critère et réunit les dimensions d’état et de pratique. La pleine conscience étant d’après lui une pratique qui consiste à devenir plus conscient de notre expérience à chaque instant. C’est un état naturel qui viserait à vivre chaque instant pleinement. Ainsi la pleine conscience serait une pratique reconnectant le sujet à son état naturel.

 

La définition de Bishop et du FFMQ

Une partie importante de la littérature étudie et définit la pleine conscience à travers les processus cognitifs mis en jeu. Cela témoigne de l’intérêt des thérapies comportementales et cognitives pour ce domaine d’investigation. Il est à noter que les critères fondamentaux du contact au moment présent et de la qualité d’attention traversent également ces définitions.

C’est ainsi que pour Bishop (2004), la pleine conscience est un processus de régulation de l’attention permettant d’amener une qualité de conscience non élaborative vis-à-vis de l’expérience présente et une qualité de relation à l’expérience avec une orientation de curiosité, d’ouverture et d’acceptation sans jugement.

De même, le Questionnaire Cinq Facettes de la pleine conscience (Five Facet Mindfulness Questionnaire de Baer, Smith, Hopkins, Krietemeyer et Toney, 2006) adopte une vision cognitive de la pleine conscience selon cinq aspects.

  • L’observation des stimuli internes ou externes (les sensations, les émotions, les cognitions, les éléments visuels, sonores ou olfactifs).
  • La description c’est-à-dire remarquer ou étiqueter verbalement ces stimuli.
  • L’action en conscience c’est-à-dire le fait de porter son attention à son activité du moment, plutôt que d’agir sur le mode pilote automatique.
  • Le non jugement vis-à-vis de l’expérience vécue, le sujet évite d’évaluer les sensations, cognitions ou émotions.
  • La non-réaction face à l’expérience interne c’est-à-dire en permettant aux pensées, aux émotions d’évoluer dans le champ de la conscience sans rétention d’attention.

 

La synthèse de Berghmans

Berghmans et al. (2010) énoncent une définition synthétique de la pleine conscience, cette dernière pouvant être décrite comme :

  • Un état dans lequel le sujet est hautement conscient du moment présent, le reconnaissant et l’acceptant ;
  • Une état dans lequel l’esprit du sujet ne se laisse pas accrocher ou n’est pas parasité par des pensées, sensations ou émotions à propos d’expériences présentes, passées ou d’attentes futures qui surgissent ;
  • Une posture intérieure dans laquelle le sujet fait attention à l’expérience présente de manière vigilante ou encore au flux de stimuli continu interne et externe au fur et à mesure de son apparition dans une optique de non jugement et de non évaluation ;
  • Un état d’esprit qui met en valeur la conscience, l’attention et l’habileté à se dégager de schémas de pensées non adaptatifs qui rendent l’individu vulnérable à des états de stress et à d’autres états pathologiques.

 

Ainsi d’après l’ensemble de ces définitions, la méditation de pleine conscience se caractériserait donc fondamentalement par l’attention au moment présent selon une attitude particulière. Il apparait que la pleine conscience fasse appel à des qualités d’observation, d’attention, de présence, de non-jugement, de non-réactivité face à certains éléments de l’expérience vécue.

 


Mathieu Crotti, Psychologue, Psychothérapeute, Méditation de pleine conscience, Aix-en-Provence